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Vente d’immeuble : l’erreur de diagnostic doit être la cause directe du préjudice

Le 15 février 2016
La réparation d’une erreur directe de diagnostic doit être limitée à cette erreur. La réparation intégrale du préjudice subi par l’acheteuse de l’immeuble ne peut être obtenue.

Une société acquiert un immeuble. Quelques mois plus tard, un diagnostic technique de l’état de l’immeuble est établi, concluant au bon état général des bâtiments et excluant la nécessité de travaux importants. Trois ans après la revente de l’immeuble par la société acheteuse, des fissures importantes apparaissent en sous-sol. Invoquant une erreur de diagnostic, l’acheteuse assigne le technicien en responsabilité. La cour d’appel fait droit à sa demande mais limite l’étendue du préjudice indemnisable aux seuls désordres directement causés par l’erreur du diagnostiqueur. A l’appui de son pourvoi en cassation, la société acheteuse soutient que le diagnostiqueur immobilier doit répondre de toutes les conséquences de son erreur d’expertise. Son pourvoi est rejeté par la Cour qui confirme l’analyse de la cour d’appel, en refusant d’octroyer la réparation intégrale du préjudice.

Par un arrêt rendu le 8 juillet 2015 (n° 13-26.686), la chambre mixte avait retenu la responsabilité d’un professionnel qui avait donné, contrairement « aux normes édictées et aux règles de l'art » un diagnostic immobilier erroné. En conséquence, le diagnostiqueur avait dû réparer les divers chefs de préjudices subis par les acheteurs, à savoir le préjudice matériel né du coût des travaux de réparation et le préjudice de jouissance. Pour rendre sa décision, la Cour s’était appuyée sur les textes spéciaux du droit immobilier en énonçant qu'« il résulte de l'article L. 271-4 du Code de la construction et de l'habitation que le dossier de diagnostic technique annexé à la promesse de vente ou à l'acte authentique de vente d'un immeuble garantit l'acquéreur contre le risque mentionné au 3° du deuxième alinéa du I de ce texte et que la responsabilité du diagnostiqueur se trouve engagée lorsque le diagnostic n'a pas été réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l'art, et qu'il se révèle erroné ».

Il convient de souligner que depuis près de vingt ans, les pouvoirs publics ont progressivement multiplié les obligations incombant aux propriétaires d'immeubles bâtis de produire différents diagnostics techniques au moment de la vente (plomb, amiante, termites, risques naturels et technologiques, performance énergétique, état des installations de gaz et d'électricité), regroupés dans un dossier de diagnostic technique (CCH, art. L. 271-4) que le vendeur doit remettre à l'acquéreur. Or le vendeur, dès lors qu’il aura transmis ce dossier à l’acquéreur, et sous la seule réserve de sa mauvaise foi, se voit protégé, en cas d'inexactitude, par l'article 1646 du Code civil ou par la clause de non-garantie des vices cachés qui aura fréquemment été insérée dans la vente (Civ. 3e, 6 juill. 2011, n° 10-18.882). Faute de pouvoir faire jouer la garantie du vendeur, l'acheteur déçu n'a d'autre choix que de mettre en jeu la responsabilité professionnelle du diagnostiqueur en démontrant qu'il n'a pas eu le comportement diligent d'un homme de l'art (Civ. 2e, 17 sept. 2009, n° 08-17.130 ; Civ. 3e, 21 mai 2014, n° 13-14.891).

La preuve de sa faute se révèle donc essentielle. C’est la raison pour laquelle la chambre mixte avait principalement fondé sa solution sur la notion d’erreur de diagnostic, autrement dit sur la faute du diagnostiqueur, sans trop s’attarder sur la question du lien de causalité, que la troisième chambre civile place au contraire, dans la décision rapportée, au cœur de son raisonnement. Sans se démarquer radicalement de sa jurisprudence antérieure à l’arrêt rendu en chambre mixte, selon laquelle, contrairement aux première et deuxième chambres civiles recourant à la notion de perte de chance, la troisième chambre retenait que le manquement commis dans l'établissement de l'un des diagnostics techniques cause à l'acheteur d'immeuble un préjudice certain lui permettant d'être indemnisé à hauteur du coût des réparations rendues nécessaires (Civ. 3e, 26 sept. 2001, n° 99-21.764 ; 23 mai 2007, n° 06-13.656 ; 12 sept. 2012, n° 11-18.122 ; 21 mai 2014, n° 13-14.891), elle refuse en l’espèce de réparer intégralement le préjudice en l’absence de preuve d’un lien causal entre la faute contractuelle et les sommes réclamées par l’acheteuse.

C’est pourquoi si elle fait droit à la demande d’indemnisation du surcoût des travaux rendus nécessaires par l’aggravation des désordres, celle-ci ayant été directement causée par l’erreur commise, elle rejette celle du coût des travaux de reprise dès lors que dans tous les cas et donc même en l’absence de faute du diagnostiqueur, ces travaux auraient dû être entrepris pour rendre l’immeuble conforme aux normes de sécurité.

(Civ. 3e, 7 janv.2016, n° 14-18.561)

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