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Harcèlement moral: Le poste du salarié joue pour prouver sa mauvaise foi dans la présentation de harcèlement moral pas suffisamment justifié

Le 09 mars 2018
Harcèlement moral: Le poste du salarié joue pour prouver sa mauvaise foi dans la présentation de harcèlement moral pas suffisamment justifié
La Cour de cassation donne des précisions concernant la charge de la preuve incombant à l'employeur pour démontrer la mauvaise foi d'un salarié s'estimant harcelé.




Le statut protecteur du salarié se prétendant harcelé. 


La situation d’un salarié qui se prétend victime de harcèlement moral bénéficie d’un statut très protecteur concernant le licenciement.

En effet, les articles L 1152-1 et suivant du Code du travail empêchent l’employeur de licencier un salarié qui subit des faits de harcèlement moral. Cette protection s’étend même au salarié qui témoignerait en faveur du salarié qui se dit harcelé.

Cette protection est très importante puisqu’un employeur qui licencierait un salarié harcelé verrait le licenciement requalifié en licenciement nul, avec des conséquences pécuniaires extrêmement importantes. En effet, les ordonnances Macron du 22 septembre 2017 n’ont pas touché à ce régime puisque le salarié pourrait réclamer une indemnité au moins égale à six mois de salaire. Le licenciement nul reste d’ailleurs un des seuls moyens pour le salarié d’éviter la barémisation en cas de licenciement abusif.

Enfin, le régime de harcèlement connait un mode de preuve extrêmement simplifié puisque le salarié doit simplement présenter des faits qui ferait présumer l’existence de faits de harcèlement moral.

La jurisprudence a appuyé l’objectif de protection du législateur concernant la protection des salariés harcelés. En effet, les conseillers du Quai de l’Horloge ont réaffirmé l’impossibilité pour l’employeur de licencier un salarié qui aurait dénoncé des faits de harcèlement moral (Cass., Soc., 10 mars 2009, n°07-41.092). La Cour de cassation a toutefois nuancé son propos en considérant qu’un salarié ne pourrait plus être protégé si celui-ci est de mauvaise foi (Cass., Soc., 7 février 2012, n°10-18.035). Elle a ensuite précisé qu’un salarié est de mauvaise foi lorsque l’employeur démontre que le salarié présente des faits ou des pièces dont il connait le caractère mensonger (Soc., 10 février 2016, n°14-13.792).

Bien que nuancé, la protection des salariés est importante puisqu’il est très difficile à l’employeur de prouver qu’un salarié avait connaissance de la fausseté de pièces qu’il avancerait.

Un exemple jurisprudentiel.

Dans l’arrêt commenté, une salariée occupait un poste de secrétaire. Cette dernière a été licenciée, et conteste son licenciement pour faute grave en prétendant que celui-ci est en fait motivé par des faits de harcèlement moral et demande la nullité de ce dernier. Elle présente notamment devant le conseil de prud’hommes des courriers devant présenter des faits faisant présumer l’existence d’un harcèlement.

La cour d’appel de Chambéry n’accueille pas la demande de la salariée. Selon la cour d’appel, la salariée ne présente pas d’éléments suffisamment pour laisser présumer des faits de harcèlement moral.

De plus, la cour d’appel considère que les courriers dont se basent la salarié présentent un doute sur leur authenticité puisque l’employeur a démontré qu’il utilisait toujours le même modèle de présentation et que les courriers présentés possédaient des différences. Ainsi la salariée était de mauvaise foi et le licenciement pour faute grave a été maintenu.

La Cour de cassation reprend le raisonnement de la cour d’appel et apprécie le poste occupée par la salariée pour justifier sa mauvaise foi.

En effet, d’après la Cour de cassation, la salariée occupant le poste de secrétaire, avait accès quotidiennement au modèle de courrier réalisé par la direction, et aurait dû avant de présenter les courriers pour prouver le harcèlement, être plus diligente, puisqu’elle connaissait la présentation dudit modèle.

Ainsi, la Cour de cassation caractérise le poste du salarié pour apprécier la preuve de l’employeur de la mauvaise foi du salarié. Cela signifie que désormais, il sera certainement plus simple à l’employeur de prouver la mauvaise foi d’un salarié ayant accès à des documents de la direction puisque le doute de la falsification serait plus grand.

Pour ces salariés qui voudraient prouver les faits de harcèlement, cet arrêt semble être une alerte sur les documents à présenter. En effet, pour la secrétaire, le versement aux débats de document extérieure à son poste auraient été plus efficaces car le doute de falsification serait moins grand.

Cet arrêt qui semble anodin renferme donc de nombreuses interrogations sur la preuve du harcèlement moral qui se durcit pour les salariés en contact avec les outils de la direction.

Cass., Soc., 7 février 2018, n°16-19594

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